jeudi 31 décembre 2020

Les aventuriers...

 ...des Wilderlands.

En route pour de nouvelles aventures

   Il y a donc deux ans, j'ai entamé la constitution d'une nouvelle table pour une campagne « ouverte » naissante. Il m'a tout de même fallu un peu de temps pour préparer l'ensemble puisque j'ai mis entre cinq et six mois pour le tout (ici). Durant ce temps de réflexion et de préparation, j'ai lancé quelques hameçons afin de vérifier si je trouverais bien les joueurs attendus. La surprise fût agréable car j'ai obtenu la formation d'un groupe de sept joueurs (dont deux femmes !) pour démarrer cette campagne. Autant dire que pour le lancement de cette dernière, j'étais gonflé à bloc !

Un début prometteur

   La création des personnages s'est faite avec un premier choix pour les joueurs : soit 3d6 pour chaque caractéristique et ils distribuent les résultats selon leur bon vouloir ; ou bien, 4d6 en soustrayant le dé ayant le résultat le plus faible mais en attribuant les valeurs dans l'ordre de la fiche de personnage, à savoir F., I., S., D., C. et Ch. (selon le canon de D&D). J'ai eu une assez bonne répartition entre les deux méthodes, ce qui a permis à tout le monde de jouer ce qu'il souhaitait. Bien que chacun ait déterminé la somme d'argent qui lui est attribuée en début de jeu, j'octroie un matériel de base considérant que les personnages n'ont pas décidé de partir à l'aventure du jour au lendemain. A mon sens, il est tout à fait plausible de considérer que chacun ait pu mettre un peu de monnaie de côté, se créant de la sorte un pécule de départ que je donne sous la forme de quelques pièces d'équipement (avec quelques limites, tout de même ; par exemple, les combattants ne peuvent débuter avec une armure de plate...). Par contre, le joueur qui omet un élément lors de la création devra se débrouiller pour trouver un exemplaire en cours de partie ; et certains équipements ne courent pas les rues ou bien peuvent avoir subi une inflation selon l'endroit où se retrouvent les personnages.

   Le groupe constitué était essentiellement axé sur des combattants à la base ; je dis cela car il y aura des changements suite à des décès. En effet, il y avait un ½ Ogre, un Guerrier (venant de la jungle de Lagoldurma, donc typé mésoaméricain), un Ranger, une Paladine, un Barbare Oriental (typé « mongol » et venant du royaume de Karak, à l'est), un Dragi (classe similaire à celle de l'Elfe - donc combattant et jeteur de sorts - possédant des traits draconiques, mais sans pouvoir particulier [ici] ; cette classe me sert de base pour l'antique peuple que l'on trouvait dans la Vallée des Anciens) et, pour finir, une Magicienne. Donc un groupe sans possibilité de soins et sans personnage furtif type Voleur. Je trouvais cela très bien car tous les joueurs savent que le style O.S.R. est létal et qu'il faut alors faire montre d'une très grande prudence... Je me réjouissais à l'avance des prouesses d'ingéniosité que le groupe allait devoir faire et j'attendais avec impatience de voir comment il allait se sortir des situations délicates et mortelles dans lesquelles il ne manquerait pas de se trouver.

Les festivités classiques avant l'aventure !

   Chaque personnage a eu connaissance de cinq rumeurs plus ou moins spécifiques (le Guerrier, la Paladine, le Barbare Oriental et le Dragi ont eu vent de choses particulières) qu'ils pouvaient, selon leur souhait, partager ou pas. Et c'est forts de tout ceci que les aventuriers ont entamé cette campagne qui s'annonçait épique...

Chez les Hobbits

   Le groupe a fait connaissance dans un petit village hobbit qui est réputé pour sa production viticole et vinicole. Un démarrage sans grande innovation puisque la quasi totalité des protagonistes est arrivée là en travaillant comme escorte d'une caravane marchande. Seul le ½ Ogre est natif de ce village ; c'est donc surtout pour lui que la rencontre va être décisive puisque ces baroudeurs vont lui donner la possibilité de partir à l'aventure en se joignant à eux et proposant, par le fait, son impressionnante corpulence qui peut servir à intimider... Rapidement, un événement survient : un petit convoi a été attaqué par des brigands et un seul survivant, ayant réussi à s'enfuir, vient quérir de l'aide dans le petit bourg. La communauté est en émoi et c'est avec courage que les aventuriers fraîchement arrivés proposent leurs services. Le village offrira une récompense pour cette intervention ; mais certains membres de la compagnie se félicitent d'intervenir gracieusement. L'aventure prévue est un module d'introduction reprenant les éléments fournis dans le manuel du Basic Set et développé à plusieurs mains par des membres du réputé site Dragonsfoot. Cette histoire pouvait être bouclée par la Compagnie, mais une vague rumeur d'un Dragon vivant potentiellement là-bas, dans les ruines d'un vieux château, a rapidement dissuadé les aventuriers d'approfondir leur expédition de sauvetage des prisonniers. Ainsi, lorsqu'ils eurent tôt fait de retrouver un marchand et une demoiselle (qui n'était autre que la fille d'un noble local !), ils rentrèrent au village sans demander leur reste.

Une entrée peu encourageante...

La peur de la campagne ouverte

   Ce qui est marquant, avec ce début de campagne, c'est la crainte qu'une rumeur a bien pu faire naître chez les personnages. Le style de jeu O.S.R. a pleinement joué ici ; les joueurs n'ont pas voulu prendre de risques inconsidérés et ont misés sur la prudence (n'oubliant pas que dans une campagne dite « ouverte », il est fort possible de faire des rencontres disproportionnées et donc possiblement létales). Bien leur en a pris, même si cela s'est fait au détriment d'une richesse potentielle. Ce qui a été aussi très amusant, c'est le caractère de chaque équipier qui s'est rapidement dévoilé. Mais le groupe a su intelligemment utiliser les capacités et autres compétences de chacun pour optimiser les résultats en minimisant les risques. Il y a eu une véritable recherche opérationnelle du problème soumis aux joueurs et ils ont agi en excellents tacticiens, ne laissant que peu de choix aux brigands (dont ils ont faits trois prisonniers). Un autre point fort intéressant se trouve être la suite donnée à cette première aventure. En effet, plutôt que d'essayer de retourner dans les ruines, les joueurs ont considéré que le chapitre était clos pour eux et ils ont donc réfléchi à ce qu'il fallait faire des prisonniers ainsi que de la jeune fille. Etant dans un village perdu en pleine campagne, la justice royale ne pouvait être rendue ici même. Par ailleurs, la demoiselle étant la fille d'un baron local, le groupe a donc pris la décision de convoyer la jeune femme, et les brigands prisonniers, auprès du seigneur local. Cette action aurait deux impacts notables : le premier, l'assurance d'une belle récompense en restituant la demoiselle à son père ; le second, une publicité glorieuse à la Compagnie qui prouverait, par ses actes, sa vaillance et sa volonté de combattre le Mal honorablement... Le relais de la justice étant alors transmis au noble, vassal du roi, qui aurait tout le loisir de juger lui-même les scélérats ou bien de les mener en la capitale royale. J'ai été particulièrement et agréablement surpris par la vitesse à laquelle l'équipe de joueurs a su s'adapter à ce que je leur proposait, à savoir la campagne ouverte.

Les perspectives envisageables

   Une fois au château dudit baron, les aventuriers ont donc pris leurs marques. J'avais, comme il se doit, concocté et préparé un module très connu et renommé pour cette compagnie d'explorateurs. Toutefois, compte tenu de la popularité de cette aventure, j'ai effectué quelques rajouts, transformant notablement l'ensemble - je ne voulais pas que quelqu'un puisse découvrir immédiatement ce qui était prévu et gâche ainsi son plaisir. Dans ce module, il y a des parties en extérieur ainsi que des incursions souterraines. J'ai revu à la hausse les « missions » se passant dehors tout en rajoutant des éléments pour les expéditions dans les cavernes et autres catacombes. Les joueurs pouvaient ainsi alterner entre le château (où il y a des intrigues internes), la campagne environnante et l'exploration des grottes - du Dungeon Crawling pur et dur. Ils ont aussi la possibilité de quitter les lieux pour découvrir le monde qui s'offre à eux... Une assez belle palette sur laquelle ils peuvent faire les choix qu'ils souhaitent, selon leurs aspirations et leurs envies ! Les personnages ont donc commencé par se faire connaître auprès du baron en lui ramenant sa fille et en lui livrant les brigands. Puis, ils ont proposé leur concours pour le cas où il y aurait besoin et donc rendu quelques menus services à la communauté. Bien entendu, cela les a conduits vers les cavernes dont ils ont entamé prudemment l'exploration.

La Compagnie souffre et s'agrandit

   Les pérégrinations souterraines n'ont pas été de tout repos malgré les précautions que le groupe a pu prendre. En effet, les aventuriers ont eu à déplorer des blessés (l'un a perdu l'ouïe sur une oreille et une autre a eu le bras directeur cassé ; ces deux blessures sont consécutives à des coups critiques portés par des créatures) ainsi que la perte de deux des leurs (le Dragi et la Magicienne), plus par manque de chance que par erreur tactique. Ces évènements ont incité notre Compagnie à faire preuve de davantage de circonspection afin de minimiser les risques liés aux aléas des dés. Dans la foulée, suite à la création de nouveaux personnages pour remplacer les défunts, il y a eu l'arrivée d'un Elfe et d'une Druidesse qui se sont substitués aux précédents respectivement. L'Elfe a, d'ailleurs, eu beaucoup de chance (?) car il est le seul membre de l'équipe a posséder un pouvoir psionique (je précise que j'applique la règle donnée dans le D.M.G. de AD&D concernant l'utilisation de ces capacités et du risque inhérent de rencontres avec des créatures usant elles aussi de ces mêmes aptitudes). Ensuite, pour pallier le manque de participants lors de certaines sessions (une seule fois, nous avons dû jouer avec une équipe restreinte à quatre joueurs ; ce fût l'occasion d'effectuer deux petites aventures en extérieur), j'ai élargi le recrutement (il faut dire aussi que l'un des joueurs - le Guerrier - a quitté l'aventure pour des raisons personnelles). La chance nous a souri car nous avons pu voir s'adjoindre quatre nouveaux joueurs (dont un de la gent féminine !). Le groupe s'étoffe et est désormais composé d'un ½ Ogre (sourd d'une oreille), d'un Ranger, d'une Paladine (qui a un bras cassé, pour le moment, et qui a réussi à se sortir d'une malédiction pour le moins déshonorante, abjecte et terriblement cruelle), d'un Barbare Oriental, d'un Elfe, d'une Druidesse, d'un autre Elfe (cacochyme, celui-ci), d'un Clerc, d'un Nain et d'une Dragi (la nouvelle joueuse) ; ce qui porte l'effectif à dix personnages ! A noter que les nouveaux arrivants ne connaissaient pas la constitution de la Compagnie et qu'ils ont donc fait des choix qui leur sont propres. Le groupe reste très axé sur le combat, même si l'élément magique s'est considérablement renforcé avec, désormais, trois combattants/jeteurs de sorts et deux personnages capables de prendre soin des autres. Il faut relever, par ailleurs, que le nombre de joueurs peu paraître lourd, mais il n'en est rien. J'ai la chance d'avoir d'excellents joueurs doués d'un savoir être au plus haut niveau. Même dans les situations où la discussion est de mise, les échanges se font toujours de manière cordiale, polie et respectueuse de la parole de chacun ; cela m'aide grandement dans la gestion de cette campagne. Et lorsque nous jouons en équipe complète, je dois avouer que je comprends les tablées que l'on peut trouver aux Etats-Unis et qui laissent certains D.M. parfaitement pantois (ici). C'est dans ces moments-là que je saisi pleinement les capacités extraordinaires de mon groupe de joueurs qui peut, en faisant tout de même montre de prudence, tenter de relever n'importe quel défi...

Toujours plus de menaces...

La suite...

   Et bien l'avenir nous dira ce qu'il en est. Notre rythme de jeu mensuel a sérieusement été étrillé par la pandémie et, au moment où j'écris ces lignes, cela fait maintenant plus de deux mois que nous n'avons pas pu nous réunir. Je gage qu'il faille encore un mois minimum - voire deux ?!? - avant que la Compagnie ne puisse reprendre du service. Quoi qu'il en soit, le développement suivi par les personnages jusque-là reste très satisfaisant. Ils poursuivent une exploration méthodique, entraînés en cela par un N.P.C. malveillant qui a d'autres desseins et cherche à exploiter au mieux les capacités et compétences de l'équipe. Un évènement extérieur est venu se greffer à l'ensemble et la Compagnie a su déjouer avec brio une attaque en règle du castel dans lequel ils siègent. Malheureusement pour eux, ils ne semblent pas percevoir les intrigues qui prennent forme petit à petit ; cela promet d'être épique pour le final. Grâce à leurs agissements, l'un d'entre eux va peut-être (s'il saisit cette chance) se hisser socialement et cela apportera un panel de choix qui pourra conduire le groupe sous d'autres cieux et à d'autres fonctions. Bien entendu, je ne peux me prévaloir des décisions que la bande va prendre, tant sur le court terme que sur le long. Les joueurs étant totalement libres, il m'est impossible d'imaginer ce qu'ils vont envisager de faire. Malgré tout, j'espère qu'ils sauront rester unis et que cela ne partira pas dans tous les sens (c'est un des risques majeurs d'un groupe nombreux). Pour les aspects ludico-techniques, les personnages sont presque tous au niveau 3 ; ce qui est appréciable si l'on prend en considération qu'il n'y avait pas de « soigneur » initialement. Mais maintenant, ils atteignent le virage fatidique dans lequel on voit beaucoup de décès, l'équilibre étant pour le moins précaire entre assurance et risques. En effet, c'est à ce stade-là que les personnages peuvent avoir envie de forcer la chance, de faire preuve d'audace et, parfois, le hasard - malheureux, cela est indéniable - en décide autrement, faisant passer de vie à trépas certains... Mais nous n'en sommes pas là et c'est le coeur empli d'espoir que j'attends la délivrance sanitaire pour écrire de nouvelles lignes avec mes amis joueurs !



En attendant ce jour... à l'aventure Compagnons !

vendredi 25 décembre 2020

Une nouvelle campagne...

 ...dans les Wilderlands !

L'appel de l'aventure.

   Aussi loin que je puisse me remémorer, dans mes souvenirs de rôliste, je m'aperçois que j'ai constamment eu l'envie et le besoin de mener une table. Non pas que ce soit le « pouvoir » - ou plutôt l'impression de cette autorité - qui m'ait intéressé, mais au contraire, le désir d'écrire et de partager des histoires à plusieurs mains ; les miennes et celles des joueurs. Voir se construire, petit à petit, les personnages et leur influence dans le monde (à condition qu'ils survivent !). C'est pourquoi, il y a bientôt deux ans, j'ai décidé d'organiser et de mettre en place une nouvelle campagne...

Question de choix

   Avoir envie de se lancer dans une nouvelle aventure est stimulant, mais il y a d'abord quelques questions auxquelles il faut apporter des réponses... Il me fallait choisir des règles, un style de jeu, un monde, un rythme de réunion, un nombre de joueurs et enfin, trouver ces derniers. Ces aspects préliminaires permettent déjà de dégrossir le projet et les différentes étapes valident la viabilité de l'entreprise.

Pour être honnête, il m'a fallu un peu de temps pour me décider. En effet, je ne souhaitais pas vendre du rêve à des joueurs potentiels pour finir par être rattrapé par la vie quotidienne et ne plus être capable d'assumer le rôle de D.M., finissant alors par me désister et décevant la tablée. Et puis je me connais, je sais pertinemment que si je me lance dans une nouvelle aventure, ce sera à 200 %, avec passion... Mais au final, je n'ai pas su (ni voulu !) résister à l'appel de l'inconnu et de ses mystères ! [Avec le temps, je m'aperçois que j'ai souvent raté quelques jets sous Sagesse...]

Les règles

   Pendant quasiment l'ensemble de ma vie de rôliste, j'ai utilisé les règles d'AD&D. La très grande majorité des « Grognards » que nous sommes est passée assez tôt de la version Basic/Expert à celle qui a logiquement suivie, AD&D. Mais, comme beaucoup et ainsi que le favorise ce jeu, j'ai rapidement modifié le corpus de règles pour lui adjoindre des éléments maison ou bien des modifications et autres « améliorations » proposées par les magazines et fanzines de l'époque (Dragon Magazine et White Dwarf en premier lieu). L'inflation constante des règles - accentuée aussi par T.S.R. et ses ouvrages (Unearthed Arcana, Oriental Adventures, Wilderness Survival Guide, Dungeoneer Survival Guide etc.) - a fini par donner naissance à une créature hybride extrêmement lourde à gérer. [Il est d'ailleurs fort probable que ce soient nos comportements de l'époque qui nous ont conduits à l'aboutissement qu'a connu Dungeons & Dragons avec ses versions 3.5 et consorts. Un amas de règles indigestes et dont le contrôle échappe totalement aux joueurs.] Bien que n'ayant pas adopté la seconde édition (les règles que j'utilisaient à l'époque me convenant grandement), le jeu que je pratiquais était déjà lourd ; intéressant et amusant, mais devenant parfois pénible dans son ergonomie. Je reconnais que j'étais (et suis toujours !) responsable de cela ; en effet, ces ajouts et autres modifications résultaient bien de mes choix...

   Donc, pour avancer dans ma réflexion, il fallait que je choisisse quelles allaient être les règles que j'allais utiliser : AD&D ou bien autre chose ? Etant donné que je partais pour une table O.S.R., trouver des joueurs n'allait peut-être pas être chose aisée ; je devais donc partir sur un corpus de règles simples pour éviter d'avoir un jeu rebutant et déroutant. C'est donc tout logiquement que j'ai opté pour un retour aux sources avec la mouture Basic/Expert de Dungeons & Dragons.


   Outre la simplicité des règles et l'extrême rapidité de création des personnages, il y avait aussi un autre avantage - et pas des moindres - : les règles ont le vent en poupe dans la sphère de l'O.S.R. et il existe des rétro-clones à des prix plus qu'abordables (voire des règles gratuites en version numérique ; Labyrinth Lord, Swords & Wizardry ou O.S.E. pour n'en citer que quelques-uns), certains étant même traduits en Français. Assez rapidement, je jetais donc mon dévolu sur ces règles. J'étais, par ailleurs, très heureux de revenir à cette base car il s'agit aussi d'une madeleine de Proust... Je retrouvais l'excitation de mon adolescence, brassant mes livres et vieux papiers et imaginant déjà des histoires incroyables !

Du style...


   Le corpus de règles étant choisi, il me fallait désormais réfléchir quant à la manière de jouer. Pour le coup, cela allait être beaucoup plus facile car j'ai quasiment toujours maîtrisé mes campagnes de la même manière, à savoir en mode « ouvert ». Sans aller théoriser un style de jeu pour lequel je ferais certainement des erreurs et ne cherchant pas m'attirer les foudres des spécialistes, je vais donner une définition qui n'en est pas une mais qui s'apparente plutôt à une pure et simple explication de ma pratique.
   Lorsque je maîtrise, je joue en campagne dite « ouverte ». Ce que j'entends par là, c'est que le monde qui s'ouvre aux joueurs est complètement libre. Les personnages sont créés puis « lâchés » en un lieu et il ne leur reste que l'embarras du choix. Les joueurs ont toute latitude pour choisir ce qu'il veulent faire de l'existence de leurs personnages.

Parés pour l'aventure !

   Toutefois, il y a quand même deux ou trois petites choses qui permettent de donner du lien. D'abord, chaque personnage se voit attribuer des savoirs sur le monde (restreint, certes) qu'il connaît ; c'est ce que nous pourrions appeler, pour nous, des connaissances générales. Celles-ci sont une approche très globale d'une Histoire du monde qui peut se résumer à quelques faits, hauts personnages et autres grandes légendes. Généralement, j'adapte un peu en fonction du « background » du personnage car ces derniers ne viennent pas tous du même milieu ni du même endroit. Il est donc tout à fait possible que certains connaissent des éléments qui peuvent être inconnus à d'autres... Ensuite, j'attribue cinq « rumeurs » à chacun des personnages ; là aussi, il y a un ajustement en fonction de la classe/race du personnage. Ces ragots peuvent être complètement fantaisistes, ou bien partiellement fondés, ou encore tout à fait véridiques. Les joueurs en font ce qu'ils en veulent ; ils peuvent partager avec les autres ou non et ils sont libres de le faire quand ils le souhaitent. Certaines de ces « légendes » peuvent avoir subit quelques variantes ; un aventurier a pu entendre dire qu'il y avait des morts-vivants dans une région marécageuse, tandis qu'un autre aura entendu dire que l'on parle de vampire... Forts de toutes ces connaissances, les joueurs peuvent déjà avoir une petite idée de ce qu'ils pourraient avoir envie de faire ; par exemple, celui qui a ouï-dire d'une île où serait caché le trésor d'une bande de pirates peut envisager de partir en expédition pour s'attacher à dérober ce butin qui leur tend les mains... A lui donc de convaincre ses compagnons d'aventure. Enfin, je fixe un module de base qui servira de liant et de prétexte au fait que les personnages se rencontrent. Cette aventure est un moyen de se familiariser avec les règles, d'obtenir un petit butin et de permettre aux aventuriers de faire connaissance les uns avec les autres. Mais, ils sont totalement libres de s'engager dans cette première aventure ou pas ; ils ont aussi la possibilité d'exploiter directement leurs savoirs, leurs « légendes »...

Les premiers pas...

   Ensuite, le style « campagne ouverte » nécessite une préparation sérieuse de la part du D.M. Puisque les personnages peuvent aller où ils veulent et faire ce qu'ils veulent, il faut que tout soit prêt : rencontres (aléatoires ou préparées), sites à visiter (cavernes, ruines...), villes et autres cités plus ou moins renommées, personnages fameux (religieux, forgerons, marchands, sages, magiciens, monarques et autres nobles...) etc. Il est impératif d'appréhender un minimum ce monde afin que les joueurs aient vraiment la sensation que tout est en mouvement et qu'il y a de la vie. Et, pour boucler cette campagne dite « ouverte », il faut placer les  différents modules et autres aventures auxquels les joueurs pourront soumettre leurs compétences. Afin de satisfaire au mieux tout ceci et de faciliter la maîtrise de l'ensemble, le choix du monde est primordial...

Le monde


   C'est désormais l'univers dans lequel vont évoluer les aventuriers qui va occuper mon esprit. En effet, quel va être cet espace dans lequel je serai suffisamment à l'aise et libre pour transmettre cette même liberté aux joueurs ? Il y a deux aspects qui ont guidé ma réflexion : un point de vue pratique et un second, plus conceptuel.
   Compte tenu de mon style de jeu, à savoir la campagne « ouverte », il me fallait quelque chose de commode à l'utilisation. Bien qu'ayant joué essentiellement sur Greyhawk, j'ai souvent eu du mal pour travailler avec les coordonnées en abscisses et en ordonnées ; de plus, c'est un peu pénible à l'usage car il faut sans cesse croiser les informations pour savoir où se trouvent les personnages (malgré la surimposition de la grille d'hexagones sur la carte). J'ai donc commencé par lorgner du côté des Wilderlands de JUDGES GUILD. Les cartes sur lesquelles chaque hexagone est affublé d'un numéro sont plus qu'agréables.

Un choix presque évident pour moi...

De plus, les différentes éditions de ce monde proposent des livrets dans lesquels le travail de la campagne « ouverte » est déjà bien avancé puisque des éléments de rencontres sont déjà situés. Quant à l'utilisation de la numérotation, c'est véritablement un plaisir que de s'entendre dire « nous partons pour Tell Qa en empruntant la route impériale »... Et s'il me vient des questions, les réponses arrivent rapidement car il suffit de transcrire le déplacement en une série de numéros indiquant, par-là même, le chemin suivi. S'agissant donc de l'outil, c'est parfait ; cela me convient tout à fait !
Pour les notions conceptuelles, le monde des Wilderlands est un univers où le syncrétisme est le maître mot. Tout, absolument tout, est possible. Que l'on aborde les questions spirituelles, culturelles, politiques, économiques et démographiques, tout est décrit de manière succincte (mais précise) et laisse donc la possibilité au D.M. de pouvoir broder à sa guise et selon les envies des joueurs. Dans le cadre d'une campagne « ouverte », cela est très appréciable car il est envisageable de pouvoir répondre à toute demande émanant des joueurs, de leurs personnages.
Enfin, grâce à la numérotation des hexagones, il est plus qu'aisé de situer les différents modules d'une ludothèque. Bien évidemment, cela laisse la part belle au hasard car la bande d'aventuriers peut se trouver confrontée à une menace donnée que les personnages devront s'efforcer d'apprécier au mieux afin de savoir s'ils s'engagent ou non dans telle ou telle histoire. Ce facteur est hautement létal et les joueurs doivent donc apprendre très vite à mesurer ce qu'ils apprennent et, surtout, à bien préparer leurs aventures. Ainsi, le temps des « One-Shot » adaptés au niveau du groupe est dépassé ; place au risque et à la Mort !!!

Une rencontre peut mal tourner...

A ce stade de la réflexion, l'affaire est quasiment bouclée ; il reste maintenant le principal : les joueurs.

De la contingence...


   Le cadre étant posé, il faut désormais s'attacher à traiter les aspects pratiques inhérents à notre monde qui, lui, est bien réel... En souhaitant démarrer une campagne « ouverte », je ne me fixe aucune limite temporelle. Je ne me dis pas que l'on va jouer jusqu'à ce qu'un personnage (ou plusieurs) atteigne un certain niveau canonique, par exemple. L'idée est de laisser les joueurs sans pression aucune afin que leurs personnages puissent évoluer comme chacun l'envisage et/ou l'espère. Cette idée laisse aussi une grande souplesse au rythme puisqu'il n'y a pas de contrainte de temps. Néanmoins, étant donné l'ouverture laissée aux joueurs, il est tout de même souhaitable d'essayer de mettre en place des rendez-vous réguliers afin que le fil conducteur des choix des joueurs reste à l'esprit de chacun, sans avoir à faire une heure de résumé à chaque session... A mon sens, une base mensuelle est une bonne mesure permettant de concilier vie professionnelle, familiale et ludique.
Et puis je caresse l'espoir d'un déroulement sur le long terme, espérant voir se développer la vie des personnages, projetant les velléités de chacun avec une bonne probabilité de réussite. Je dois avouer que j'admire les récits de certains D.M. qui racontent avec régularité les faits et gestes de leurs groupes d'aventuriers et ceci sur un temps long.
Vient ensuite les joueurs. Par expérience, j'ai trop vu de sessions avorter par manque de participants ; aussi, nourri à des règles déjà anciennes, une tablée de sept joueurs ou plus ne m'effraie aucunement. Je dois même avouer que cela me convient et me plaît. J'ai donc fait le pari de miser sur un effectif de dix joueurs, autorisant ainsi le déroulement d'une session même s'il y a un ou deux absents. Une campagne « ouverte » pouvant être létale, il est préférable d'avoir un groupe solide pour affronter et surmonter les obstacles. En ce qui me concerne, la jauge tolérable de mon salon me permet de pouvoir réunir dix joueurs en une fois ; optimisant, de la sorte, les chances de survie du groupe.
Pour rester sur les joueurs, il faut maintenant trouver ces derniers. Qui, à l'encontre du battage médiatique qui est fait sur la toile pour la dernière édition en date de Dungeons & Dragons, va vouloir se lancer dans un jeu O.S.R. ? Il va donc falloir faire preuve de persuasion et réussir à vendre un système de règles qui a déjà plus de quarante ans. Mais c'est un challenge que j'accepte de relever. Quelques coups de téléphone, des sessions d'initiation lors de conventions, des explications vantant la facilité de création des personnages et me voilà parti pour un recrutement digne d'un jeu T.V. Mais je suis optimiste de nature et passionné ; cela devrait faire l'affaire...

Recruter, non pas des N.P.C., mais des joueurs... !

Quelques recherches, des échanges, de la patience et... en route Compagnons !

mardi 22 décembre 2020

D'un monde...

...à l'autre.

Emprunter le portail...


   Cela fait maintenant un peu plus de quarante années que je pratique le Jeu de Rôle et, hormis peut-être les deux premières, j'ai toujours maîtrisé. Durant certaines périodes, j'ai été joueur et D.M. ; mais j'ai bien plus souvent endossé le deuxième rôle.
   Je pense que vous le savez tous, maîtriser est un art et lorsque l'on se trouve de ce côté de l'écran (D.M. donc), nous jouons à un tout autre jeu... J'ai toujours considéré que le rôle du meneur de jeu était d'écrire conjointement avec les joueurs, à plusieurs mains, une histoire dont tous se remémoreraient les faits bien des années plus tard.
   Bien qu'ayant, pour la plus grosse partie de ma vie de rôliste, maîtrisé dans le monde de Greyhawk, c'est vers un autre univers que j'ai décidé de me tourner. En effet, j'ai finalement franchi le pas en décidant de me jeter dans les Wilderlands de JUDGES GUILD. Depuis que j'ai découvert ce hobby, ce monde m'a toujours attiré ; mais c'est un peu par facilité que je me suis d'abord attaqué à Greyhawk.

   Les raisons qui m'ont d'abord poussé à aller vers Greyhawk, puis celles qui m'ont inciter à changer pour les Wilderlands sont diverses.

Entre cadrage et facilité


   Lorsque j'ai découvert le Jeu de Rôle (Dungeons & Dragons), j'étais adolescent et vivais dans une petite ville perdue. Trouver du matériel de J.d.R. (dés, modules, livres etc.) nécessitait de faire beaucoup de kilomètres (en tout cas, pour un adolescent sans moyen de locomotion et donc dépendant) et il était alors impératif de revenir avec du butin lorsqu'on montait une « expédition ». Par le fait, nous nous tournions vers la « grande » marque de l'époque, T.S.R., et achetions ses produits. C'est donc pour cette principale raison que je me suis d'abord lancé sur les terres de Greyhawk.

Le monde fabuleux de Greyhawk !

   Ensuite, débutant à la fois dans le J.d.R. et dans la maîtrise, j'avais besoin de cadre pour être guidé et rassuré. Il faut bien reconnaître - bien que le livret de nomenclature de ce monde soit relativement succinct - que l'entreprise avait vu juste en proposant des modules intégrés directement dans son monde... L'histoire de T.S.R. nous montre aussi que le développement va suivre avec des livres et autres accessoires qui viendront étoffer l'ensemble, offrant toujours plus de cadre et de rigidité aux D.M.
   Je me sentais donc accompagné pour mes premiers pas dans cet univers rôlistique. Je dois aussi avouer que - en tant que wargamer - j'étais attiré par les hexagones, que cette carte gigantesque était magnifiquement belle (et elle l'est toujours) et qu'il y avait de quoi explorer pour les aventuriers qui se retrouvaient face à moi...

Les limites...


   Toutefois, le temps passant - et cela va très très vite lorsque l'on est adolescent ! - et mon caractère s'affirmant, j'avais besoin de plus de liberté. En effet, le fait de me retrouver confronté à des canons (politiques, religieux, économiques) ludiques, qui paraissaient immuables, me gênait considérablement. Si l'on racontait, à d'autres joueurs, que nos aventuriers avaient réalisé tel ou tel exploit, nous nous trouvions face à un mur de contestations. Les choses ne pouvaient s'être passées de la sorte puisque tel monarque, telle tribu, tel monstre légendaire avait dit/fait ou était là... [Aujourd'hui, il y a d'excellents blogs qui sont très agréables à lire, mais qui me dérangent sur l'aspect ludique.] Assez vite, j'ai éprouvé l'envie de faire ce que je voulais et, surtout, de pouvoir proposer à mes joueurs ce dont ils rêvaient. Cherchant toujours à assouvir ma soif de découverte et ma curiosité par le biais de mes lectures liées au J.d.R. (magazines et autres fanzines), j'ai vite découvert l'existence d'un autre monde que celui proposé par T.S.R., je veux parler des Wilderlands. Cet univers était publié par une firme nommée JUDGES GUILD (et il l'est toujours, d'ailleurs !).


   Je ne vais pas - ni ne veux - entrer dans les polémiques qui encombrent l'aura ludique de cet éditeur et me contenterai donc de discuter de jeu et uniquement de cela... Je laisse à chacun le soin de se faire sa propre opinion et ses choix individuels.

   Toutefois, l'ampleur du phénomène Dungeons & Dragons produit par T.S.R. faisait beaucoup d'ombre aux autres éditeurs et JUDGES GUILD passait donc (enfin, ici en France pour le moins) pour une firme obscure dont les productions étaient rares et réservées à une « élite ». [D'ailleurs, pour ma part, il fallait que je me rende jusqu'à Lyon pour trouver des produits des gammes de JUDGES GUILD.] Néanmoins, les quelques éléments que j'avais réussi à glaner ici et là m'avaient mis l'eau à la bouche.

La découverte


   Le monde des Wilderlands semble beaucoup plus sauvage et dangereux que celui de Greyhawk...

Les dangers des Wilderlands...

   Qu'on ne s'y méprenne pas, l'environnement offert par T.S.R. est tout aussi dangereux car c'est avant tout le D.M. qui peuple et fait vivre le monde dans lequel évoluent les personnages. Mais les Wilderlands ont un côté plus Pulp que l'on ne retrouve pas nécessairement dans Greyhawk. En tout cas, j'ai toujours eu plus de facilité à m'imaginer les aventures d'un Conan dans le monde de JUDGES GUILD...

   L'espace de jeu est, lui aussi, gigantesque. Nous avons là un territoire aussi grand que le pourtour méditerranéen que nous connaissons. D'ailleurs, l'étendue aqueuse principale se situe aussi au centre du monde décrit, ce qui pousse assez vite les joueurs à découvrir les aventures maritimes.

Les Wilderlands et leurs dix-huit cartes !

   Ce « bac à sable » est infini... Les esprits, les rêves des joueurs et des D.M. sont lâchés et livrés à eux-mêmes ! Sur chacune des cartes est surimposée une grille d'hexagones qui font, chacun, huit kilomètres d'un bord à un autre. Les éléments géographiques constitutifs sont indiqués (routes, collines, forêts, fleuves etc.). Jusque-là, rien de bien neuf par rapport à Greyhawk. Mais JUDGES GUILD va donner un numéro à chaque hexagone ; ceci permettra aisément de se repérer sur l'immensité du territoire, contrairement au monde de T.S.R. où il faut faire une petite gymnastique intellectuelle en croisant les abscisses et les ordonnées des hexagones pour les repérer/nommer sur la carte. Il est donc extrêmement facile de se retrouver dans les Wilderlands et tout aussi simple de les peupler d'aventures et de monstres !

Un exemple...

   Mais ceci n'est pas tout. Il reste encore à découvrir ce que renferme ce monde, quels sont ses mystères et ses dangers, de quoi il est constitué...

La structure


   L'aspect qui m'a le plus enthousiasmé est sans nul doute la relative facilité avec laquelle nous pouvons faire le rapprochement avec notre monde - actuel ou historique - à la manière dont a pu le faire Robert E. HOWARD dans ses oeuvres touchant à Conan. En effet, évoquer Viridistan fait appel à une culture persane ; les barbares de la jungle de Lagoldurma ne sont pas sans rappeler les tribus mésoaméricaines ; les Skandiks convoquent largement et facilement la culture viking... Bien entendu, il est possible de faire le même genre de parallèle avec Greyhawk ou encore Mystara ; mais cela me paraît moins évident.
   Ensuite, le syncrétisme avec lequel les auteurs des Wilderlands ont abordé l'aspect religieux est jouissif et fascinant. Bien qu'il y ait des divinités de notre monde (notamment les panthéons égyptien, nordique et celtique pour n'en citer que quelques-uns), il est possible d'inventer ou d'inclure des religions autres, laissant ainsi une liberté incroyable aux joueurs. De la sorte, un Issek de la Cruche est plausible voire même recommandé ; tout Clerc ou religieux quel qu'il soit peut vénérer la divinité qu'il souhaite, sans que cela bouleverse l'équilibre du monde. [A ce propos, je ne peux que préconiser l'utilisation du très riche, très amusant et très instructif Petty Gods.]
   Puis, les trames politiques restent lointaines, succinctes et suffisamment légères pour que n'importe D.M. puisse s'en emparer. L'Histoire de ce monde appartient aux joueurs et chacun peut donc y mettre ce qu'il veut ; aucune table des Wilderlands ne ressemblent à une autre et le maître mot reste « liberté ». Alors bien sûr, il y a bien quelques personnages bons et/ou mauvais çà et là, mais rien n'est figé ; tout est susceptible de pouvoir être travaillé et transformé pour le plus grand bonheur de tous. Les rêves épiques des joueurs et de leurs personnages peuvent être satisfaits, pour peu qu'il y ait survivance...

La Cité des Epices, la Cité Immortelle... Viridistan !

   Enfin, le remplissage de ce monde se fait presque intuitivement. L'utilisation de la numérotation de chaque hexagone permet de « meubler » chacun d'entre eux avec un repaire, un donjon etc. Les lieux habités - villages, villes et autres citadelles - sont recensés succinctement et quelques rencontres « préparées » sont indiquées pour chaque carte. Mais la magie réside dans le fait que chaque D.M. peut choisir l'emplacement qu'il juge le plus approprié pour sa campagne pour chacun des modules qu'il veut placer ici. Ainsi, les modules T.S.R. peuvent trouver leur endroit ; il suffira alors au D.M. de changer un nom pour que cela passe comme si de rien n'était... [Pour ma part, j'ai placé tous les modules et autres scénarii en ma possession sur les différentes cartes. Ce travail me permet, désormais, de pouvoir répondre instantanément à mes joueurs ; ils peuvent aller où ils veulent (même très rapidement avec un sortilège de téléportation, par exemple), je suis en mesure de leur proposer une rencontre, une aventure etc.]

Des lieux à explorer...

Le suivi à travers les différentes éditions


   Un des autres avantages des Wilderlands est la passion qui a accompagné ce monde depuis sa création. Par le fait, plusieurs éditions se sont succédées et, ainsi, les Wilderlands ne sont pas tombées dans l'oubli...

Une des éditions originales.

   La première publication date de 1977. Dès le départ, elle a été soutenue de la manière décrite ci-dessus ainsi qu'à travers les pages des magazines publiés par JUDGES GUILD, que ce soit Judges Guild Journal, Pegasus ou bien The Dungeoneer. Elle se présentait sous la forme de livrets (vendus avec les cartes) et l'ensemble a été édité au fur et à mesure, progressivement.

   L'édition la plus aboutie et la plus fouillée, bien qu'étant destinée à la version 3.5 de Dungeons & Dragons, a été publiée en 2005 par NECROMANCER GAMES.

Une relique des plus complète !

Cette version a été produite sous la forme d'une boîte comprenant les cartes (dix-huit, dont le défaut majeur reste l'impression recto/verso !) et deux gros livrets pour près de 550 pages. Le travail de JUDGES GUILD a été repris tel quel, mais il a été aussi développé, fouillé, travaillé pour donner encore plus de détails (je ne parle pas de précision). Certes, l'édition visée était la 3.5, mais l'objet est très largement utilisable pour toutes les éditions possibles de Dungeons & Dragons ; il s'agit là d'un véritable outil. A noter qu'il y a eu aussi la publication d'un Player's Guide qui reprend en substance quelques informations, notamment celles touchant aux races lors de la création des personnages. Le seul regret que je puisse avoir avec cette édition est relatif aux cartes. En effet, ainsi que je l'ai dit plus haut, elles sont imprimées en recto/verso et sur des tons de gris, ce qui ne facilite aucunement la lecture des documents. Il est vrai qu'un peu de couleur aurait été profitable, mais le budget (et donc le prix de vente) a vite atteint ses limites. Néanmoins, ne serait-ce que pour la compilation des informations, cet objet vaut le détour (et l'acquisition). [Aujourd'hui, la valeur de cette boîte a pris un envol tout bonnement astronomique et absurde !]

   Une dernière édition en date a été produite par BAT IN THE ATTIC GAMES, propriété de Robert S. CONLEY.

La dernière édition...

Cette publication a repris le format initialement choisi par JUDGES GUILD, à savoir l'édition d'un livret accompagné des cartes qui correspondent aux régions présentées. A ce propos, les livrets sont des fac-similés des originaux avec, tout de même, quelques précisions/corrections et ajouts de la part de l'éditeur. En revanche, les cartes ont été entièrement revues et proposent - à l'inverse des cartes de NECROMANCER GAMES - de la couleur, ce qui rend ces outils parfaitement lisibles. L'ensemble complet est constitué de quatre livrets et des cartes.

Une histoire qui finit mal... ?


   Malheureusement, les déboires à caractère raciste rencontrés par les descendants de Bob BLEDSAW (fondateur de JUDGES GUILD) ont fini par pousser les distributeurs à prendre position contre ces attitudes et, ainsi, les produits sont littéralement bannis, donc introuvables... Bien évidemment, cela est très mauvais pour le porte-monnaie des joueurs car ces produits deviennent alors « collectors » et vont souffrir d'une spéculation honteuse. C'est d'autant plus problématique que cela ne remet aucunement le travail qui avait été réalisé par l'auteur originel. Et l'on se retrouve donc puni par les actes de gens qui n'ont rien à voir avec les produits originaux.
Néanmoins, les propriétaires actuels de la maison d'édition continuent de publier et ont adopté une politique de réédition de leur gamme. Il semblerait que les cartes aient été retravaillées (la qualité semble plus que satisfaisante) ; il est peut-être possible d'envisager une quatrième édition de ce monde fabuleux des Wilderlands... ?!?!


   Pour l'heure, contentons nous de ce que nous avons et ne cherchons pas à spéculer sur d'hypothétiques rééditions...

Affûtez vos épées, prenez vos dés et... à l'aventure Compagnons !













lundi 21 décembre 2020

Quand la bêtise conduit à la détestation.

De la relation d'une aventure loupée ou... mal menée.

   Il nous arrive, parfois, d'être surpris désagréablement par des individus que l'on respecte profondément et que l'on tient pour des personnes raisonnées. Ces découvertes nous laissent un goût amer en bouche et l'on regrette, souvent, d'avoir pu être le témoin de celles-ci... 

Promenade sur la toile

   J'ai pu lire récemment, au gré de mes pérégrinations virtuelles sur le net, le récit d'une campagne rapporté sur un blog. En fait, les personnages viennent de démarrer et les deux à trois épisodes lus sont, en réalité, juste quelques éléments racontés des aventures mais, surtout, les ressentis des joueurs et du D.M.

   Le système utilisé est celui proposé par Necrotic Gnome avec son, récemment publié, O.S.E. Je rappelle que ces règles reprennent celles de Dungeons & Dragons sous la version Basic/Expert. Il s'agit donc d'un jeu O.S.R. avec une simplicité d'appréhension des règles et d'interprétation autant pour le D.M. que pour les joueurs.

   Le D.M., quant à lui, est un « vétéran » qui maîtrise donc ce système et connaît parfaitement les écarts existant entre les versions originelles du jeu et ces incarnations plus contemporaines. Les joueurs, pour leur part, proviennent du monde des éditions plus récentes (comprenez 3.5 à 5) et semblaient avoir envie de découvrir le jeu sous sa forme Oldschool... Le meneur de jeu, pour faire bonne mesure, s'est lancé dans la conduite du module bien connu qu'est le B2 - The Keep on the Borderlands ; histoire initiatique s'il en est !

   Au final, avec des joueurs rôdés et un D.M. chevronné, des règles simples, un module parfait pour un début, tout était réuni pour avoir le récit d'aventures palpitantes !

L'objet du délit...

Erreur de casting...

   Dès la première lecture, j'aurais dû me douter que quelque chose n'allait pas fonctionner. En effet, les joueurs ne sont que trois et les personnages choisis (un Voleur, un Magicien et un Guerrier) ne laissent pas entrevoir de grandes chances de succès (à défaut de survie). Trois aventuriers seulement pour un module de cette envergure, il me semble que cela fait un peu léger... Pire, il n'y a qu'un seul véritable combattant et les deux autres sont vraiment, vraiment fragiles (que ce soit en terme de points de vie ou bien en protection avec une Classe d'Armure adaptée). Si vous êtes familiers avec ce module, vous imaginez tout de suite que cela risque d'être extrêmement difficile pour le groupe, à moins d'agir en appliquant la technique des Horaces et des Curiaces... Il faut donc envisager une série d'aller et retours entre le château et le site des cavernes.

   Avec un tel D.M., nous aurions pu nous attendre à avoir une mise en garde des joueurs - lesquels ont une expérience relative avec les versions 3.5 à 5 et aucune avec le style O.S.R. - quant à l'aspect létal des combats. Il aurait été aussi bienvenu de les inciter à recruter des N.P.C. afin de grossir leur escouade et améliorer leurs chances de survie. Ce que l'on peut laisser faire avec un scénario « one shot » afin de mieux faire comprendre aux joueurs ce qu'est le style O.S.R. est proprement irresponsable avec un module tel que le B2 - The Keep on the Borderlands. Il paraissait alors difficile d'avoir une survie acceptable au sein du groupe avec un tel départ. Il est évident que l'expérience ludique des versions « modernes » de Dungeons & Dragons ne pouvaient que laisser une vision biaisée de la réalité du jeu en O.S.R. ; omettre la létalité du jeu Basic/Expert c'est envoyer au casse-pipes des aventuriers sans aucune garantie de gloire, même à titre posthume. C'est un sacrifice vain !

Les cavernes bien connues et malfamées !

Une catastrophe annoncée...

   A la lecture du premier récit posté sur le blog du D.M., les qualificatifs grossiers ont immédiatement fusés. Ils étaient destinés au système de règles ainsi qu'au module. Apparemment, les joueurs ont eu des difficultés à savoir quoi faire de leur personnage face aux problèmes posés par l'environnement hostile qui les cernait. Je ne suis pas étonné lorsque l'on sait comment les règles « modernes » (comprenez 3.5 à 5) pilotent les joueurs/personnages ; il suffit de faire un jet de « Fouille » pour trouver... En O.S.R., le joueur doit expliquer clairement ce que son personnage fait et où il le fait. Alors forcément, ça fonctionne beaucoup moins bien (pour paraphraser Bourvil !) dans un système de règles qui attend des joueurs de l'imagination alors qu'ils ont été nourris de jets de dés pour toute action, quelle qu'elle soit.

   Ensuite, le groupe d'aventuriers est parti la fleur au bout du fusil et s'est attaqué derechef à la première caverne  visitée, comptant probablement sur la bienveillance du D.M. ainsi que sur leur relative invulnérabilité (encore un héritage des versions actuelles), sans même prendre le temps d'effectuer une reconnaissance des lieux. Le nombre des créatures rencontrées aura eu tôt fait d'avoir raison des aventuriers et l'on a commencé alors à dénombrer des morts... Je ne m'étendrai pas non plus sur la bêtise tactique des joueurs qui se sont laissés écraser plutôt que de fuir (mais il faut leur reconnaître que cela est imputable à leur « formation » originelle et à leur inexpérience de l'O.S.R.). Encore une fois, le J.d.R. tel qu'il était pratiqué à l'époque demandait un raisonnement tactique des plus évidents. La crainte de la mort était aussi omniprésente et, bien que la création d'un personnage ne prenne pas plus de dix minutes, les joueurs faisaient attention aux actions qu'ils engageaient.

   C'est alors qu'apparaissent des remarques et autres critiques de la part des joueurs à propos des règles de O.S.E. Je m'attendais à une modération de la part du D.M., mais il n'en fût rien, bien au contraire... Puis, ce fût au tour du module d'être critiqué. Certes, on peut toujours trouver quelque chose à redire d'un scénario, surtout pour ce qui concerne les modules officiels de T.S.R. à cette époque ; mais de là à dire que c'est de la « merde » (pardonnez mon écart de langage, mais je transcris ce qui a été dit), je trouve que le qualificatif est un peu fort (et c'est peu dire !). Nombre de D.M. raisonnables et sensés vous diront qu'ils ont apporté des modifications en fonction de leurs goûts ou bien de ceux des joueurs. D'ailleurs, Gary GYGAX lui-même (auteur du module) préconise une lecture approfondie du fruit de son imagination et incite le D.M. a modifier ce que bon lui semble ; c'est la base même de notre passion !

   Les joueurs et leur meneur de jeu ont alors commencé à vouloir tester des classes particulières, croyant pouvoir trouver LA solution à leurs problèmes ! Comme si rejeter la faute sur les classes allait les aider à sortir de leur bêtise crasse...

Le castel du seigneur local...


Retour de flammes

   Alors je ne suis pas dupe. Je suis parfaitement conscient que ma réaction est induite par mon amour sans limite pour ce module et ce système de règles, très certainement parce que cela fait partie de histoire personnelle... Cela a été ma porte d'entrée dans la découverte du Jeu de Rôle et il y a bien un effet de madeleine de Proust. Mais si l'on essaie d'être objectif dans l'analyse de ce qui est reproché à l'ensemble par ces joueurs, il me semble honnête de dire que l'échec de tout ceci leur incombe entièrement.

   En premier lieu, je pense que le D.M. est complètement fautif. Il n'a pas su expliquer dans le détail ce qu'est un jeu en O.S.R. Prévenir les joueurs que les combats sont létaux, qu'il faut faire des efforts pour expliquer ce que le personnage fait et comment il s'y prend, qu'il peut être salutaire de fuir et, éventuellement, de revenir ultérieurement pour conclure ce qui a été commencé... Il est aussi responsable de son inadaptation vis-à-vis de ce que ont réalisé ses joueurs. Il aurait pu, par le biais de mises en garde ou bien d'insistances, offrir aux personnages la possibilité d'enrôler des troupes de soutien ou les intimider suffisamment pour qu'ils aient peur et agissent beaucoup plus prudemment.

   En second lieu, les joueurs sont irresponsables et stupides. Il est facile, de nos jours, d'aller glaner çà et là, des informations concernant le style de jeu O.S.R. ; par le fait, ils auraient dû être informés des tenants et des aboutissants du jeu. De plus, à associer leurs critères et modes de jeu habituels à une généralité inexistante les a induits en erreur. Ils ont certainement cru que leur D.M. serait bienveillant, que leurs personnages étaient invincibles, que tout était géré par des règles et des jets de dés... Le jeu O.S.R. est une école difficile et dure ; je considère cela comme un peu la Légion Etrangère du J.d.R. Un personnage qui franchit les niveaux les uns après les autres et survit est un véritable aventurier et mérite le respect...

Les Hobgobelins des cavernes !

In fine...

   Ainsi que j'ai pu le dire en introduction, j'ai été déçu par ce D.M. et ses joueurs ; mais ils méritent ce qu'ils ressentent. Au bout du compte, je rigole intérieurement car je sais qu'ils sont passés à côté de choses merveilleuses. J'espère que ce meneur de jeu aura l'occasion de renouveler sa réflexion. Quant aux joueurs, ils feraient mieux de rester dans leur cour et apprendre qu'on ne se risque pas à l'aventure impunément, sans réfléchir au préalable.



En attendant, et pour ce qui nous concerne, à l'aventure Compagnons !