lundi 21 décembre 2020

Quand la bêtise conduit à la détestation.

De la relation d'une aventure loupée ou... mal menée.

   Il nous arrive, parfois, d'être surpris désagréablement par des individus que l'on respecte profondément et que l'on tient pour des personnes raisonnées. Ces découvertes nous laissent un goût amer en bouche et l'on regrette, souvent, d'avoir pu être le témoin de celles-ci... 

Promenade sur la toile

   J'ai pu lire récemment, au gré de mes pérégrinations virtuelles sur le net, le récit d'une campagne rapporté sur un blog. En fait, les personnages viennent de démarrer et les deux à trois épisodes lus sont, en réalité, juste quelques éléments racontés des aventures mais, surtout, les ressentis des joueurs et du D.M.

   Le système utilisé est celui proposé par Necrotic Gnome avec son, récemment publié, O.S.E. Je rappelle que ces règles reprennent celles de Dungeons & Dragons sous la version Basic/Expert. Il s'agit donc d'un jeu O.S.R. avec une simplicité d'appréhension des règles et d'interprétation autant pour le D.M. que pour les joueurs.

   Le D.M., quant à lui, est un « vétéran » qui maîtrise donc ce système et connaît parfaitement les écarts existant entre les versions originelles du jeu et ces incarnations plus contemporaines. Les joueurs, pour leur part, proviennent du monde des éditions plus récentes (comprenez 3.5 à 5) et semblaient avoir envie de découvrir le jeu sous sa forme Oldschool... Le meneur de jeu, pour faire bonne mesure, s'est lancé dans la conduite du module bien connu qu'est le B2 - The Keep on the Borderlands ; histoire initiatique s'il en est !

   Au final, avec des joueurs rôdés et un D.M. chevronné, des règles simples, un module parfait pour un début, tout était réuni pour avoir le récit d'aventures palpitantes !

L'objet du délit...

Erreur de casting...

   Dès la première lecture, j'aurais dû me douter que quelque chose n'allait pas fonctionner. En effet, les joueurs ne sont que trois et les personnages choisis (un Voleur, un Magicien et un Guerrier) ne laissent pas entrevoir de grandes chances de succès (à défaut de survie). Trois aventuriers seulement pour un module de cette envergure, il me semble que cela fait un peu léger... Pire, il n'y a qu'un seul véritable combattant et les deux autres sont vraiment, vraiment fragiles (que ce soit en terme de points de vie ou bien en protection avec une Classe d'Armure adaptée). Si vous êtes familiers avec ce module, vous imaginez tout de suite que cela risque d'être extrêmement difficile pour le groupe, à moins d'agir en appliquant la technique des Horaces et des Curiaces... Il faut donc envisager une série d'aller et retours entre le château et le site des cavernes.

   Avec un tel D.M., nous aurions pu nous attendre à avoir une mise en garde des joueurs - lesquels ont une expérience relative avec les versions 3.5 à 5 et aucune avec le style O.S.R. - quant à l'aspect létal des combats. Il aurait été aussi bienvenu de les inciter à recruter des N.P.C. afin de grossir leur escouade et améliorer leurs chances de survie. Ce que l'on peut laisser faire avec un scénario « one shot » afin de mieux faire comprendre aux joueurs ce qu'est le style O.S.R. est proprement irresponsable avec un module tel que le B2 - The Keep on the Borderlands. Il paraissait alors difficile d'avoir une survie acceptable au sein du groupe avec un tel départ. Il est évident que l'expérience ludique des versions « modernes » de Dungeons & Dragons ne pouvaient que laisser une vision biaisée de la réalité du jeu en O.S.R. ; omettre la létalité du jeu Basic/Expert c'est envoyer au casse-pipes des aventuriers sans aucune garantie de gloire, même à titre posthume. C'est un sacrifice vain !

Les cavernes bien connues et malfamées !

Une catastrophe annoncée...

   A la lecture du premier récit posté sur le blog du D.M., les qualificatifs grossiers ont immédiatement fusés. Ils étaient destinés au système de règles ainsi qu'au module. Apparemment, les joueurs ont eu des difficultés à savoir quoi faire de leur personnage face aux problèmes posés par l'environnement hostile qui les cernait. Je ne suis pas étonné lorsque l'on sait comment les règles « modernes » (comprenez 3.5 à 5) pilotent les joueurs/personnages ; il suffit de faire un jet de « Fouille » pour trouver... En O.S.R., le joueur doit expliquer clairement ce que son personnage fait et où il le fait. Alors forcément, ça fonctionne beaucoup moins bien (pour paraphraser Bourvil !) dans un système de règles qui attend des joueurs de l'imagination alors qu'ils ont été nourris de jets de dés pour toute action, quelle qu'elle soit.

   Ensuite, le groupe d'aventuriers est parti la fleur au bout du fusil et s'est attaqué derechef à la première caverne  visitée, comptant probablement sur la bienveillance du D.M. ainsi que sur leur relative invulnérabilité (encore un héritage des versions actuelles), sans même prendre le temps d'effectuer une reconnaissance des lieux. Le nombre des créatures rencontrées aura eu tôt fait d'avoir raison des aventuriers et l'on a commencé alors à dénombrer des morts... Je ne m'étendrai pas non plus sur la bêtise tactique des joueurs qui se sont laissés écraser plutôt que de fuir (mais il faut leur reconnaître que cela est imputable à leur « formation » originelle et à leur inexpérience de l'O.S.R.). Encore une fois, le J.d.R. tel qu'il était pratiqué à l'époque demandait un raisonnement tactique des plus évidents. La crainte de la mort était aussi omniprésente et, bien que la création d'un personnage ne prenne pas plus de dix minutes, les joueurs faisaient attention aux actions qu'ils engageaient.

   C'est alors qu'apparaissent des remarques et autres critiques de la part des joueurs à propos des règles de O.S.E. Je m'attendais à une modération de la part du D.M., mais il n'en fût rien, bien au contraire... Puis, ce fût au tour du module d'être critiqué. Certes, on peut toujours trouver quelque chose à redire d'un scénario, surtout pour ce qui concerne les modules officiels de T.S.R. à cette époque ; mais de là à dire que c'est de la « merde » (pardonnez mon écart de langage, mais je transcris ce qui a été dit), je trouve que le qualificatif est un peu fort (et c'est peu dire !). Nombre de D.M. raisonnables et sensés vous diront qu'ils ont apporté des modifications en fonction de leurs goûts ou bien de ceux des joueurs. D'ailleurs, Gary GYGAX lui-même (auteur du module) préconise une lecture approfondie du fruit de son imagination et incite le D.M. a modifier ce que bon lui semble ; c'est la base même de notre passion !

   Les joueurs et leur meneur de jeu ont alors commencé à vouloir tester des classes particulières, croyant pouvoir trouver LA solution à leurs problèmes ! Comme si rejeter la faute sur les classes allait les aider à sortir de leur bêtise crasse...

Le castel du seigneur local...


Retour de flammes

   Alors je ne suis pas dupe. Je suis parfaitement conscient que ma réaction est induite par mon amour sans limite pour ce module et ce système de règles, très certainement parce que cela fait partie de histoire personnelle... Cela a été ma porte d'entrée dans la découverte du Jeu de Rôle et il y a bien un effet de madeleine de Proust. Mais si l'on essaie d'être objectif dans l'analyse de ce qui est reproché à l'ensemble par ces joueurs, il me semble honnête de dire que l'échec de tout ceci leur incombe entièrement.

   En premier lieu, je pense que le D.M. est complètement fautif. Il n'a pas su expliquer dans le détail ce qu'est un jeu en O.S.R. Prévenir les joueurs que les combats sont létaux, qu'il faut faire des efforts pour expliquer ce que le personnage fait et comment il s'y prend, qu'il peut être salutaire de fuir et, éventuellement, de revenir ultérieurement pour conclure ce qui a été commencé... Il est aussi responsable de son inadaptation vis-à-vis de ce que ont réalisé ses joueurs. Il aurait pu, par le biais de mises en garde ou bien d'insistances, offrir aux personnages la possibilité d'enrôler des troupes de soutien ou les intimider suffisamment pour qu'ils aient peur et agissent beaucoup plus prudemment.

   En second lieu, les joueurs sont irresponsables et stupides. Il est facile, de nos jours, d'aller glaner çà et là, des informations concernant le style de jeu O.S.R. ; par le fait, ils auraient dû être informés des tenants et des aboutissants du jeu. De plus, à associer leurs critères et modes de jeu habituels à une généralité inexistante les a induits en erreur. Ils ont certainement cru que leur D.M. serait bienveillant, que leurs personnages étaient invincibles, que tout était géré par des règles et des jets de dés... Le jeu O.S.R. est une école difficile et dure ; je considère cela comme un peu la Légion Etrangère du J.d.R. Un personnage qui franchit les niveaux les uns après les autres et survit est un véritable aventurier et mérite le respect...

Les Hobgobelins des cavernes !

In fine...

   Ainsi que j'ai pu le dire en introduction, j'ai été déçu par ce D.M. et ses joueurs ; mais ils méritent ce qu'ils ressentent. Au bout du compte, je rigole intérieurement car je sais qu'ils sont passés à côté de choses merveilleuses. J'espère que ce meneur de jeu aura l'occasion de renouveler sa réflexion. Quant aux joueurs, ils feraient mieux de rester dans leur cour et apprendre qu'on ne se risque pas à l'aventure impunément, sans réfléchir au préalable.



En attendant, et pour ce qui nous concerne, à l'aventure Compagnons !






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